Chaque année, plus de 600 personnes se suicident au Royaume-Uni à cause de leur obsession pour les paris sportifs. C’en est trop pour les familles des victimes et l’association “Gambling with Lives” qui organisent des marches pour sensibiliser à ce fléau.
Ciblant en grande partie les plus défavorisés, les campagnes de publicité prônant les sites de paris en ligne ont fleuri après 2005 et la loi de libéralisation, communément appelée le “Gambling Act”. Ce matraquage auprès des plus jeunes est pointé du doigt par certains clubs de football comme le Clapton CFC mais aussi, plus étonnant, par la société de paris britannique Ladbrokes en personne!
6 clubs de foot reliés par une marche de 160 km!
Bien trop de jeunes sont séduits par le doux rêve de mettre à l’abri du besoin leur maman. Ainsi, le porte-parole du Clapton CFC, 17ème club à rejoindre “Gambling with lives” et à le crier haut et fort dans les stades, rappelle que “le football est souvent l’hameçon qui attire les parieurs pour la première fois, et beaucoup d’entre eux développent ensuite une forte et dangereuse dépendance aux jeux d’argent”.
Pour dénoncer la main mise des sponsors, rien de tel qu’un projet à grande ampleur comme “Big Step”! À l’origine, c’est l’association des parents des victimes “Gambling with Lives” qui a entrepris de fédérer des clubs autour de cette idée: ne plus afficher sur leurs maillots les marques de sites de paris en ligne pour protéger les ados et les enfants, entre autres. En gros, c’est le football, oui, l’industrie du jeu à outrance, non!
Du 23 au 26 février 2020, les soutiens de “Big Step” et son fondateur James Grimes, ont pu participer tout de jaune vêtus à une marche baptisée “6 Clubs – 100 miles – 75 hours” de passage au stade de Wembley. En la mémoire de Kimberley Wadsworth, de Ryan Myers, et de Lewis Keogh, tous trois suicidés à cause de leur dépendance aux jeux d’argent, la marche était destinée aussi à épingler les 6 Clubs autour de Londres déroulant encore et toujours le tapis rouge à SkyBet et consorts.
Une addiction au jeu dure à battre sur le terrain?
Pour appâter les 450.000 ados britanniques, ces plateformes de jeux en ligne offrent tout d’abord des paris gratuits. On a compté que 55.000 d’entre eux étaient déjà accrocs, et ce, dans la tranche d’âge la plus précoce, c’est-à-dire des 11 à 16 ans! Et selon une étude, ils ont 15 fois plus de risques de se donner la mort que le reste de la population en ayant ce type de dépendance. La légende du football, Paul Merson, a même expliqué au Daily Mail que c’était pire que l’alcool ou les drogues! Alors, doit-on s'interdire les jeux en ligne?
Heureusement, James Grimes un des organisateurs de la marche contre l’addiction a remarqué en 2019 que 14 clubs seulement sur les 28 que comptaient la compétition ont arboré fièrement un maillot encourageant les paris sportifs. Aux côtés du Clapton Community Football Club se battent également le Forest Green Rovers et le Luton Town, mais il reste encore du travail à faire pour que les clubs renoncent d’eux-même à la manne financière que représentent ces sponsors!
En effet, cela peut faire vivre les clubs modestes mais le directeur du Luton, Gary Sweet, a refusé près de 500.000£ de la part de l’industrie ludique au nom de ses principes. “Nous avons de réels devoirs et pas seulement des responsabilités en matière de football: une responsabilité à l’égard de nos supporters et de notre community”, a-t-il ajouté. Une gageure quand on voit que Bet365 a crée un stade du même nom à Stoke-on-Trent et qu’il possède son propre club…
Grâce à la marche, le Gambling Act bientôt réformé?
Ce qui est sûr, c’est la division du Gouvernement Britannique sur cette question de la “gamblification”. Pour le reste, on se dirige soit vers une interdiction totale (“blanket ban”), soit vers un compromis. Le sous-secrétaire d’État en charge des jeux d’argent, Chris Philp a parlé en début d’année 2022 de la publication d’un “Livre Blanc” regroupant toutes les propositions et mesures probables comme celle de devoir communiquer ses relevés avant de parier afin de protéger les joueurs les plus précaires, mais pour l’instant rien de concret.
Toujours est-il que le Ministre des Sports, Nigel Adams, a pu confier à la BBC que “le Gouvernement allait réviser le Gambling Act”. Et pour enrayer la machine publicitaire, le “whistle-to-whistle ban” fait déjà un carton! En France, on a la campagne de prévention “Parier, c’est pas rien” pour minimiser les risques de dérives lors de la Coupe du Monde de Football. Car 72% de joueurs français entre 18 et 35 ans sont susceptibles de recourir au dispositif d’aide “joueurs info service”. Alors jouons, mais avec modération!