Les effets secondaires du confinement: les addictions exacerbées. Le 17 mars dernier, le couperet tombait, nous voilà tous confinés! Coupés de nos habitudes, il a fallu continuer à vivre, mais autrement. Abasourdis par la nouvelle, nous nous sommes tournés vers le confort et le réconfort. Et, peu à peu ou très vite, les bonnes habitudes ont laissé place aux mauvaises.
Le changement étant brutal, on a été pris de court. Confinés pour notre bien certes, mais certains l’ont mal vécu : les jeunes ont dû ronger leur frein, les parents s’occuper de tout, les personnes âgées ont vu leur solitude atteindre son paroxysme. Tout le monde a été touché par les effets secondaires du confinement: travailleurs encore en activité, chômeurs, télétravailleurs, personnes en chômage partiel. Et c'est là que les
addictions, au jeu notamment, prennent le pas.
Grignotage et écrans
Dans les sphères familiales, on s’est adonnés aux plaisirs éphémères du grignotage et des écrans. Pour tenir le coup, plus d’1 français sur 2 a accru sa consommation de séries et de jeux vidéos. Nous libérant de nos angoisses, l’écran nous a permis une évasion momentanée. L’addictologue et président du cabinet de conseil GAE, Alexis Peschard explique que le plaisir diminue rapidement, d’où l’augmentation du temps passé à jouer pour retrouver cette sensation addictive. Cette alternance amenant insomnie et nervosité, l’addiction peut en cacher une autre.
Aux bonnes résolutions du 1er de l’An ont succédé les affres du confinement. Pour oublier la crise, on s’est réfugiés dans le plaisir immédiat qui était auparavant différé: plus besoin de sortir du bureau, la pause cigarette pouvait s’étaler dans le temps. Plus de limites pour s’adonner à l’activité hypnotisante des réseaux sociaux. Dans le sillage du coronavirus, une multitude de questions se sont posées, sur l’avenir, le professionnel, les rendez-vous et projets de vie reportés, les Français ont augmenté leur consommation d’alcool (5,5 millions de Français) et de médicaments (22 % des personnes qui en prenaient déjà).
Le sondage Odoxa pour Gae conseil permet de prendre la mesure de ce phénomène d’amplification des addictions: 27% des fumeurs ont davantage fumé pendant le confinement et 19% de personnes ont mangé plus que de raison.
Pallier aux manques
Un climat anxiogène palpable: isolement, changement de rythme, stress du télétravail, et inquiétudes sur l’avenir sont les principales causes de stress observées lors du confinement. L’être humain a besoin de lumière, et d’épanouissement social.
Or, on a vu l’économie et les échanges mondiaux mis à mal; des évènements sportifs et des spectacles annulés à tour de bras et de rôle.
55 % des français avouent que leurs dérives addictives ont été motivées par la perte de repères, et 60% par l’ennui, selon le sondage Odoxa Gae du 22 avril dernier.
Glissement des consommations
Pour continuer à vivre comme avant et combler la recherche du plaisir, qui lui n’attend pas, se sont mis en place des substituts pour les accrocs aux jeux de hasard et de
paris sportifs:
Le poker et autres
jeux d'argent en ligne a remplacé les sorties au casino. Les matchs sportifs étant suspendus, les jeux de grattage et autre loto ont pris le relai. Les
machines à sous en ligne ont, quant à elles, assouvi les besoins impérieux de tous, vu la progression de cette pratique ludique et qui permet souvent de remporter petits et gros jackpots.
La situation de crise liée au coronavirus bousculant les habitudes, certains ont dépassé leurs limites et perdu des milliers d’euros en voulant jouer à tout prix.
En cause, l’absence d’encadrement social, comme l’explique Lucia Romo, psychologue spécialiste des addictions. C’est surtout la consommation compulsive qui a pris le relai de la consommation plus réfléchie. Les
compétitions de sports virtuels nottamment, ont connu un essor impressionnant.
Nouveaux comportements?
Le confinement a été le laboratoire d’inventions (coronapéro ou apéro Skype, application StopCovid), mais aussi de découvertes sur soi et sur le monde, sur notre rapport à la nature. Retrouver notre part de rêve, rééquilibrer notre mode de consommation pourrait être les nouveaux maîtres mots. Plus que des nouveaux comportements, la période du confinement a été propice au surgissement de nouveaux questionnements et règles du jeu: sur les libertés individuelles, le numérique.
Quel changement le confinement a mis en lumière? Notre côté obscur ou notre besoin d’équilibre? Dans ce climat anxyogène, il y a des personnes qui ont épargné et se sont épargnées. Paradoxalement, pour les plus accros, la période de confinement a pu rimer avec abstinence aux jeux. S’abstenant de céder aux tentations, comme pour combattre de vieux démons, elles en ont profité pour surmonter leurs addictions. Ne plus aller au casino a pu être salvateur pour certains et se lancer le défi du sevrage forcé. Reconsidérer sa consommation, la réguler, a pu redonner espoir.
Se refaire après le confinement
Mais l’”après” suscite de nouvelles peurs: la peur de retomber dans des facilités ou des engrenages. Lucia Romo, psychologue spécialiste des addictions, craint que les joueurs ayant perdu beaucoup d’argent, cherchent à se refaire lors du déconfinement, succombant à une tentation plus forte, à un phénomène de rebond. L’aggravation des phénomènes d’addictions pourrait se révéler un souci de santé publique, en creusant le trou de la sécurité sociale. Il est important que les employeurs prennent conscience des risques d’addiction qui touchent les télétravailleurs livrés à eux-mêmes.
Le bilan de ce confinement peut être nuancé entre pertes d’argent mais prise de poids, équilibre entre élan de vie et protection. Reprendre les paris sportifs est un enjeu vital pour les opérateurs de jeu en ligne mais aussi pour les joueurs. L’Autorité Nationale des Jeux aura son rôle à jouer dans la prévention des addictions. “Joueurs Info Service” au 09 74 75 13 13, pour vous aider.