Le baccara

Le Baccara

Le baccara est par excellence le jeu des joueurs d'argent. Les moralistes le disent extrêmement dangereux... mais quand l'humanité sera gouvernée par les moralistes, la vie manquera cruellement de charme... Le baccara est prompt dans ses résultats, il ne demande pas de grandes combinaisons de la part des pontes, mais le banquier doit avoir beaucoup de sang-froid, il doit avoir surtout le coup d'oeil rapide et sondeur.

Le baccara se joue de deux manières différentes : 1° à deux tableaux, c'est le baccara proprement dit; 2° au chemin de fer. C'est le baccara tournant. Il en sera parlé sous une rubrique spéciale. 

Baccara à deux tableaux

Dans le baccara à deux tableaux, il y a un joueur appelé banquier, qui joue seul contre la société, en d'autres termes contre les pontes.

Du banquier. — Le baccara à deux tableaux se joue sur une grande table au milieu de laquelle prend place le banquier. Ordinairement, la banque se met aux enchères, et celui-là est promu à la dignité de banquier, qui offre de mettre la plus grosse somme en banque, c'est-à-dire au jeu.

C'est avec deux ou trois jeux complets de cartes que se fait la taille. On appelle ainsi l'ensemble des donnes que fait le banquier sans reméler les cartes et sans les faire couper à nouveau.

Le banquier, après avoir mêlé les cartes, les fait circuler autour de la table, et chaque ponte les mêle à son tour, si cela peut lui convenir. Le banquier fait couper par telle personne de la galerie qu'il lui plaît de désigner. Il peut brûler, avant de commencer la taille, le nombre do cartes qui lui convient, mais il doit prévenir les joueurs de son intention avant la coupe.

Des pontes, et de la banque. — Les pontes ou parleurs sont divisés en deux tableaux ou compartiments : l'un à droite, l'autre à gauche du banquier.

Chacun des pontes pose devant lui la somme qu'il veut engager sur l'un ou l'autre de ces compartiments; le banquier double provisoirement chacune de ces mises, sauf à savoir quel est celui qui, plus tard, retirera le tout.

Supposons maintenant que le banquier ait mis un louis en banque et qu'il y ait 25 pontes autour do la table. (Ils peuvent être inégalement répartis sur les doux tableaux, car chaque joueur se place où il veut, et encore, s'il est assis du côté droit, il peut néanmoins ponter sur le tableau de gauche et même sur les doux tableaux à la fois.) On voit que si le premier joueur fait un, deux ou trois francs, il n'y aura pas assez d'argent en banque pour payer toute la clientèle, c'est-à-dire les pontes. Voici alors comment les choses se passeront: la banque sera partagée on deux parties égales, une moitié sera attribuée au tableau de droite et Vautre moitié au tableau de gauche, sans qu'il y ait à se préoccuper s'il y a plus ou moins de pontes sur tel ou tel tableau. Alors le banquier payera le premier joueur de droite et ensuite le premier joueur de gauche si les deux tableaux gagnent. Mais il ne les payera jamais que jusqu'à concurrence de ce qu'il y a on banque, c'est-à-dire au delà do dix francs par chaque tableau. De même si les pontes avaient parié au delà, la banque ne pourrait leur prendre, si elle venait à gagner, , et elle ne rendrait que jusqu'à concurrence de ce qu'elle pouvait payer.

Mais les choses ne sont pas toujours aussi simples : un, deux, trois, quatre, etc., pontes peuvent être couverts (on est couvert quand il y a assez d'argent on banque pour être payé à son tour), et les autres ne pas l'être; dans n'importe quel cas, on commence toujours par couvrir les pontes à droite et à gauche, en commençant par celui qui est assis le plus près du banquier, et, tant qu'il y a de l'argent pour le faire, les autres ne vont pas, leur argent n'est pas engagé.

Banco.  Un droit encore incontesté, du moins dans les grands cercles du Sud-Ouest de la France, à Bordeaux notamment, — est celui de faire banco, en d'autres termes de faire tout ce qu'il y a en banque sur les deux tableaux. Ce droit appartient à un seul joueur, et fait qu'en ce cas, il prime sur tous les autres pontes. Si la banque gagne, son capital est doublé; mais le ponte perdant a encore le droit de faire un nouveau banco; et, à son défaut, tout autre ponte a le droit de faire également banco. La banque, si elle gagne encore, a donc quadruplé son capital au second coup; c'est-à-dire qu'elle a quatre louis au lieu du louis primitif.

Après le second banco, chaque tableau reprend son droit, et il n'est plus permis à un seul joueur de faire le banco. Cette règle est peu suivie à Paris; c'est cependant un excellent moyen pour engraisser les petites banques, ou pour s'en débarrasser.

De la donne. — Les jeux étant faits, et les cartes coupées (au premier coup seulement), par telle personne que le banquier désigne selon son bon plaisir.

Le banquier distribue les cartes une à une de la manière suivante :

1. Une carte pour la droite, une pour la gauche, une pour lui-même.

2. Une autre carte pour la droite, une pour la gauche, une pour lui-même.

Manière de compter les points. — Au baccara les points de 9, 19, 29 sont les meilleurs ; viennent après ceux de 8, 18, 28 ; 7, 17, 27. Ainsi les points qui se rapprochent le plus de 9, 19, 29, c'est-à-dire des points qui ont pour final 9, gagnent sur ceux qui sont au-dessous, ou pour mieux dire, la valeur des cartes se compte par le nombre des points qu'elles expriment. Les figures comptent pour dix.

De l'abatage. — Celui des joueurs — ponte ou banquier — qui, dans les deux premières cartes, se trouve avoir d'emblée 9 ou 19 ou 29 ; et 8, 18 ou 28 abat immédiatement son jeu.

Si le banquier a 9 ou 19 et que les pontes n'aient pas un point semblable, il ramasse tout l'argent qui était engagé.

Si le banquier n'a d'emblée que 8 ou 18, il abat également, et il gagne, à moins que les pontes n'abattent 9 ou 19. S'ils abattent 8 ou 18, il n'y a rien de fait, et le coup est comme non avenu.

Mais le banquier peut rencontrer égalité d'un côté et un point inférieur de l'autre; c'est ici le lieu de dire que le jeu de chaque tableau est absolument indépendant. Je suis à gauche, je suppose; j'abats 9, le banquier me payera à moins qu'il n'abatte également 9; si j'abats 8 il ramassera mon argent s'il abat 9; le coup sera non avenu s'il n'abat que 8. Je n'ai pas à m'occuper de l'autre tableau ; et le ponte qui tiendra les cartes de l'autre côté n'aura pas non plus à s'occuper de moi.

Bac. — Les points de 10, 20, 30 se nomment Baccara, c'est-à-dire que quand on a ces points, on ne compte rien du tout et que l'on a perdu, à moins que l'adversaire n'ait également baccara. Dans la langue des professionnels on dit simplement bac.

 

Quand on demande des cartes. — Les buches. — Si nul des joueurs — banquier ou ponte — n'a l'un des points de 8 ou 9, — et c'est le cas de dire ici que, pour tout simplifier, les dizaines ne comptent pas, c'est-à-dire que Von ait 9 ou 19, ces doux points valent; si j'ai un 9 dans l'une de mes deux cartes, et que l'autre soit un dix ou une figure, ce qui me donnerait 19, je dis néanmoins que je n'ai que 9, l'autre carte est une bûche c'est-à-dire ne compte pas.

Si donc, pour continuer l'exposition du jeu, aucun des joueurs — banquier ou ponte — n'a l'un des points de 8 ou 9, le banquier demande au ponte de droite s'il veut une troisième carte. On n'en donne jamais une quatrième au même joueur.

Le banquier pose la même question au ponte de gauche, et lui donne une troisième carte, si ce dernier le désire.

Il en prend ensuite une pour lui-même, s'il le juge à propos. — La troisième carte se donne découverte.

Quant on prend des cartes soit comme banquier soit comme ponte, cela s'appelle tirer.

On dit qu'on s'y tient ou que l'on est content si l'on no demande pas une troisième carte.

Dès que le banquier a tiré ou qu'il a déclaré être content, chacun abat son jeu.

Alors, le banquier ou celui des pontes dont le point se rapproche le plus de 9, gagne sur l'adversaire dont le point s'en éloigne d'avantage.

Par exemple, si le banquier se trouve avoir 6, l'un des pontes 5, l'autre 7, le banquier gagne avec le premier ponte, et perd avec le second.

Si l'un et l'autre ponte avaient 8 et 7, le banquier n'ayant que 6, celui-ci payerait tout le monde ; mais s'ils n'avaient que 5, le banquier prendrait la totalité de l'argent engagé sur les deux tableaux.

Si les pontes avaient 6, le banquier ayant le même point, il y aura égalité partout ; le coup serait nul.

De la main. — Le premier coup est terminé, banquier et pontes ont ramassé ou vu ramasser les mises, on recommence un nouveau coup.

Si le ponte de droite a gagné, il garde la main, s'il a perdu, il perd non seulement sa mise, mais encore la main, c'est-à-dire que le droit d'abattre, de demander une troisième carte, ou de se déclarer satisfait, passe au ponte suivant. Les choses se passent exactement de la même manière sur le tableau de gauche.

On voit donc que le ponte qui a la main a la direction des intérêts communs de tous les pontes, qui jouent sur le même tableau que lui. Et maintenant, bien que le baccara soit considéré comme un jeu do hasard (ce qui n'est vrai que pour les pontes, et encore pas d'une manière absolue), il y a des cas où la question se pose de savoir si on demandera des cartes ou si l'on se déclarera content. C'est au ponte qui a la main ou qui tient les cartes qu'il appartient de décider ce qu'il convient de faire. — S'il a moins de 5, il demandera une carte, s'il a 5 il s'y tiendra. Mieux vaut s'y tenir, mais cependant pas toujours, il faut demander une carte quelquefois pour dépister le banquier. Quand on aura pratiqué le baccara pendant quelque temps, on comprendra encore mieux pourquoi ; il serait trop long de l'expliquer ici.

Tant qu'un ponte continue à passer, il garde la main.

Celui qui a la main n'a pas seulement l'avantage de diriger les intérêts du tableau, ce qui est pou de chose, son devoir est tout tracé dans les quelques lignes ci-dessus, mais encore il est le premier a être payé. Celui qui vient après lui est le second a être payé, et ainsi de suite; de telle sorte que le ponte le plus rapproché du banquier qui était le premier est maintenant le dernier si le deuxième ponte du tableau a la main.

Des pontes debout. — Les pontes qui n'ont pas trouvé de place autour de la table, soit à droite, soit à gauche, sont dits pontes debout, leur mise ne va qu'après celle des pontes assis.

De même si un ponte, assis d'un côté, fait une mise sur le tableau opposé, il n'est payé qu'après les pontes assis du côté de ce tableau; mais il est payé avant les pontes debout qui sont toujours payés les derniers. Souvent même il est assez difficile de régler l'ordre du payement entre les pontes debout, car ils changent continuellement de place.

Du tirage. — Nous ne parlons pas ici du tirage des pontes qui doivent tirer lorsqu'ils ont moins de 5, se contenter à ce point (pas toujours cependant) ; et qui, sous aucun prétexte ne doivent tirer au-dessus de 5, sans s'exposer à payer le tableau, c'est-à-dire à être responsables vis-à-vis des joueurs qui pontaient sur leur main. Le tirage dont il va être question est celui du banquier, qui lui ne joue pas un jeu de hasard, et qui doit suivre un calcul de probabilités depuis longtemps consacrées par l'expérience. Pour cela, il est nécessaire d'examiner les cas particuliers qui peuvent se présenter.

1. Lorsque le ponte ne demande point de carte, le banquier doit en tirer une, quand bien même il aurait cinq ; car il est probable que le ponte a tout au moins un point semblable, et qu'il peut avoir en outre, ou 6 ou 7, Il ne peut pas avoir davantage ; s'il avait 8, ou 9, il abattrait.

2. Si le ponte demandant carte reçoit une figure ou un dix, c'est-à-dire une bûche, le banquier se contentera de trois.

3. Si le ponte demandant carte a reçu un as, le banquier se contentera du point de 4.

4. Si le ponte demandant carte reçoit un deux, le banquier se contentera du point de 5.

5. Si le ponte demandant carte, reçoit un trois, le banquier doit se contenter à 5. Pour mieux dire, les chances sont à peu près égales. Tout dépendra donc de l'argent engagé sur l'autre tableau, et nous dirons quelques mots à ce sujet ci-après.

6. Le banquier donnant le point de 4 à un ponte doit tirer pour lui-même une carte, quoiqu'il ait déjà cinq.

7. Si le ponte a reçu un cinq, le banquier ne peut pas se contenter à 5 ; il y en a même qui no se contentent pas à six. Cependant il est plus probable que la carte que l'on va tirer diminuera plutôt le point primitif qu'elle ne l'augmentera.

8. Lorsqu'on donne au ponte le point de 6, le banquier doit tirer, quoique possédant aussi le même point, car il ne lui reste qu'une chance pour gagner, une pour égaliser, et toutes les autres le font perdre.

9. Lorsque le ponte reçoit un sept, le banquier tire sur 8 et môme sur 6.

10. Enfin lorsque le banquier donne au ponte un huit ou un neuf, il doit lui-même se contenter dû point de cinq, même de quatre et de trois disent les professeurs. En effet, le ponte recevant un huit se trouve en main 8 ou 9, selon qu'il a tiré sur baccara ou sur un. Mais il a pu tirer également sur 2, sur 3 ou sur 4, et dans ces cas il aurait 10, 11 ou 12. Il y a donc avec les points do 5, 4, ou 3, plus de probabilités de succès que de chance de perte.

Le même raisonnement s'appliquera mieux encore à l'hypothèse ou le ponte aurait reçu un neuf. Car alors cette carte ne pourra que diminuer le point qu'il avait précédemment à l'exception d'un seul cas : celui où il aurait tiré à baccara.

Pour simplifier la démonstration, nous avons raisonné jusqu'ici comme si le banquier n'avait affaire qu'à un seul ponte. Mais les règles que nous exposons maintenant sont relatives au baccara à deux tableaux; elles ne sont donc pas absolues, et le banquier doit souvent sacrifier sa chance sur l'un de ces tableaux pour sauver l'autre. Voici un exemple qui va rendre la pensée plus facile à saisir.

Le ponte de droite demande une carte et le banquier lui donne une bûche, c'est-à-dire une figure ou un dix, il est bien évident que si le banquier a le point de cinq dans ses deux premières cartes, il y a une grande probabilité qu'il gagnera; et encore si le ponte a tiré à 5, il y aura égalité, on se payera en cartes; mais le banquier a donné sur le même coup un sept au ponte de gauche; d'après la règle, il devrait tirer à 5, il s'en gardera néanmoins, car il compromettrait sa chance sur le tableau de droite, récente. Son nom lui vient do la rapidité de sa marche. Il se joue surtout lorsqu'il ne se présente pas de Nabab chargé d'or, pour exciter, la convoitise dos pontes, on exhibant devant eux le Pactole de ses poches.

Le chemin de fer est un baccara où chacun prend la main à son tour, de gauche à droite. Celui qui a la main est le banquier, tous les autres joueurs peuvent être pontes, à moins que le premier ne fasse banco, c'est-à-dire ne tienne le tout.

Il n'existe qu'un seul tableau et c'est toujours le premier joueur à droite du banquier qui a la main, c'est-à-dire la direction du tableau; il est payé le premier et enfin il décide s'il y a lieu de demander une carte ou de se tenir aux deux premières.

Si le banco n'est pas fait par le premier joueur, il peut l'être par l'un de ceux qui viennent après lui, la préférence suivant toujours l'ordre dans lequel les joueurs sont assis. (Ici, comme au baccara à deux tableaux, les pontes debout sont toujours les derniers.) Le banquier garde la main jusqu'à ce qu'il ait perdu le coup, et son jeu se double, à chaque coup qu'il gagne ; toutefois il peut, s'il le juge à propos,passer la main à son voisin de droite; ou, à son défaut, au suivant s'il veut la prendre ; mais celui qui prend la main doit mettre au jeu une somme égale à celle que retire le banquier qui s'en va, la mise première comprise.

Aussitôt que le banquier perd un coup, la main passe, quand bien même il lui resterait une somme plus ou moins considérable en banque — c'est ce qui arrive quand le tout n'a pas été couvert chaque fois.

Si le banquier passe volontairement la main, aussitôt que celui qui l'a prise a perdu un coup, elle reste au joueur qui aurait dû l'avoir, si elle avait été transmise par suite de la perte du banquier.

Le baccara chemin de fer se joue avec six jeux entiers, en courant après un point supérieur, et alors, il courrait le risque de perdre sur les deux tableaux. Mais ce sont là des questions d'expérience, et le cadre de ce livre est trop restreint pour y faire entrer une théorie complète du baccara.

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